Aller au contenu principal

Actualités

Tous les articles

Une e-cohorte pour évaluer la qualité de vie des personnes transgenres

15 février 2023 / Temps de lecture 6 minutes

Mieux comprendre le vécu et les expériences des personnes transgenres : c’est l’objectif que s’est fixé le Docteur Jean-Etienne Terrier. Il mène une étude de suivi d’une e-cohorte, en collaboration multidisciplinaire avec différentes équipes de recherche expertes dans la santé des personnes transgenres.

Une e-cohorte pour évaluer la qualité de vie des personnes transgenres

« Les personnes transgenres ont une identité ou une expression de genre qui diffère du sexe qui leur a été attribué à la naissance », explique le Dr Terrier, chirurgien urologue à l’Hôpital Privé Jean Mermoz (Lyon – Ramsay Santé). Les parcours d’affirmation de genre sont divers et particuliers à chacun. Les demandes de ces patients sont multiples et englobent la réassignation sexuelle des organes masculins vers des organes féminins (ou Male to Female), ou des organes féminins vers des organes masculins (Female to Male). « Les interventions les plus lourdes de ces parcours hormono-chirurgicaux sont la vaginoplastie et la phalopastie. Mais les demandes peuvent évoluer dans le temps, ou rester plus légères, à l’instar du retrait de la poitrine », précise le Dr Terrier. C’est pour étudier le devenir et le vécu de cette population que le Dr Terrier a décidé de mener un suivi de e-cohorte visant à évaluer la qualité de vie globale et sexuelle des patients à l’issue du parcours chirurgical, en collaboration avec des centres spécialisés et les patients eux-mêmes.

 

Etudier l’évolution de la qualité de vie

« La littérature atteste d’une qualité de vie altérée des personnes transgenres par rapport à la population générale. L’expression de leur identité est source de discriminations, de violences, et leur parcours de soins est complexe », remarque Le Dr Philippe Martin, chercheur en santé publique à l’INSERM-INED, qui co-construit les recherches avec le Dr Terrier et la Dr Bourmaud (INSERM) associée à la construction de cette recherche.

Leur hypothèse : la qualité de vie perçue des personnes transgenres serait déterminée par des dimensions précises (soutien social, satisfaction vie sexuelle, estime de soi, parcours de soins) et l’intervention chirurgicale permettrait aux personnes transgenres qui en sont demandeuses d’améliorer leur qualité de vie. « Il n’existe que très peu d’études prospectives sur la question. En nous projetant sur le long terme, nous voulons grâce à cette étude évaluer l’impact de nos interventions sur ces patients et démontrer l'évolution positive de leur qualité de vie à l’issue du parcours chirurgical », résume le Dr Terrier.

 

Une étude par méthode mixte, des questionnaires en ligne

L’étude prévoit l’administration de questionnaires en ligne. Des rappels réguliers par SMS permettront de recueillir les données autodéclarées mensuellement pour un suivi longitudinal. « Ces outils numériques de suivi permettront de répondre aux questions facilement et à distance. En plus de faciliter le recueil et le traitement des données, cette méthode nous permettra d’éviter de perdre de vue un grand nombre de patients », détaille le Dr Terrier. L’étude combinera une partie quantitative, issue de questionnaires validés, à des entretiens qualitatifs individuels et collectifs avec les participants autour de questions ouvertes sur la qualité de vie et ses dimensions.

« Nous avons fait le choix d’une méthode mixte pour mieux décrire les différentes dimensions de la qualité de vie des personnes interrogées », note le Dr Martin. Outre la qualité de vie des patients, les chercheurs s’intéresseront  à leur satisfaction et à leur accès aux services de santé. « Nous chercherons également à préciser les questions à poser ou ne pas poser aux personnes, afin d’accompagner et d’interroger au mieux les enjeux de vie liés à la transidentité », ajoute encore le Dr Martin.

 

Une recherche multidisciplinaire et collaborative

A cette recherche participent plusieurs centres : L’Hôpital Privé Jean Mermoz, le CHU de Lille, le CHU de Limoges ainsi que le laboratoire INSERM CIC-EC1426. « Nos travaux sont le fruit d’une collaboration construite avec des chirurgiens, des psychiatres, des médecins et des chercheurs en santé publique mais aussi et surtout des patients experts et des associations de patients », insiste le Dr Terrier. « Il nous semblait indispensable de bâtir notre protocole, d’élaborer les questions de recherche et la méthodologie avec les personnes concernées par ces vécus de transition. Cette approche participative et multidisciplinaire, basée sur la communauté impliquée à toutes les étapes, est capitale », abonde le Dr Martin.

Le protocole vient d’être validé par le CPP et la réunion de lancement devrait se tenir d’ici fin février. L’évaluation prospective doit ensuite durer 2 ans. Les résultats de ces recherches sur la qualité de vie des personnes transgenres doivent permettre d’éclairer et d’aiguiller les décisions et les politiques publiques, dans une démarche de promotion de la santé, de développement d’actions de soutien. « Et pour nous médecins, ces travaux visent à progresser dans notre prise en charge », conclut le Dr Terrier.

 

Cette étude est soutenue par la Direction Recherche et Enseignement de Ramsay Santé.